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PERVERS NARCISSIQUE : UN ANIMAL SOCIAL

Devant les ravages d’une personnalité perverse, il est parfois logique de se poser une question simple : mais que fait l’entourage ? La réponse est sans appel : rien, ou peu de choses. Au vu de ce que subissent les victimes, ce silence est effrayant. Mais plutôt que de condamner des proches devenus mutiques, il est plus utile de chercher à comprendre les raisons de ce silence, pour peut-être, essayer de le rompre.

La personnalité perverse et son emprise sur l’autre

Une personnalité perverse présentant une structure de personnalité qu’est la perversion narcissique, porte en elle une soif narcissique insatiable. Elle cherche en permanence à la combler. Elle se repaît de tout ce qui peut étayer l’image grandiose dont elle a besoin pour se soutenir. Cette quête permanente de narcissisme amène le pervers à articuler sa vie autour d’une recherche : celle du pouvoir. On ne s’étonne guère donc que l’argent, le sexe, mais aussi l’emprise sur les autres soient fondamentaux pour lui.

Est-ce pour cela que l’on rencontre les pervers narcissiques dans les professions qui leur permettent d’exercer leur pouvoir sur autrui ? Certainement, car ils affectionnent les postes de commandement, mais aussi, les positions qui leur permettent de se poser comme aidants. Une personnalité perverse aime par exemple, porter l’uniforme, non pour œuvrer au bien commun, mais pour assouvir ses pulsions de pouvoir. Elle cherche ainsi le regard des autres et la notoriété dans tous les champs sociaux. Il n’est pas rare de croiser des individus, hommes comme femmes, construits autour de cette structure de personnalité dans les associations ou en politique.

Or, il est curieux de constater que les dérèglements de leur personnalité passent à peu près inaperçus. Pourquoi ?

Une personnalité perverse narcissique possède un trait de caractère singulier : elle alterne un jeu de masque. Il la fait osciller entre le vice et la vertu, avec une aisance sociale remarquable. En public, il ou elle s’érige en défendeur de la veuve et de l’orphelin. En coulisse, il ou elle révèle sa cruauté ou son tempérament d’escroc.

C’est de là qu’il faut comprendre l’impasse dans laquelle se retrouve la victime. Elle seule connaît la part d’ombre du personnage, mais la puissance de manipulation de son bourreau la maintient dans le silence. On touche là l’un des traits de la personnalité perverse qui fascine le psychanalyste comme le commun des mortels : sa remarquable plasticité psychique. Gare à celui ou celle, en effet, qui tombe dans les filets de ce redoutable piège, sous couvert de relation amoureuse… Ces victimes sont dans l’impuissance de confondre socialement leur bourreau. Elles s’en retrouvent déstabilisée sur le plan de leurs valeurs et de leur estime de soi.

Mais que fait l’entourage ?

Face aux redoutables talents du manipulateur, on comprend déjà mieux l’impuissance des amis ou de la famille des victimes. Le manipulateur pervers, ou la manipulatrice, leur réserve d’ailleurs 2 traitements bien distincts : la séduction ou la mise à l’écart. Il s’agit en fait d’une véritable tactique, car les autres n’ont guère d’importance à ses yeux, le but poursuivi étant ailleurs : il s’agit de l’isolement physique et psychique des victimes.

L’entourage qui sera séduit sera en premier lieu la famille. Pourquoi ce choix ? Parce qu’il est avant tout stratégique. C’est avec sa famille que la victime entretient les liens les plus forts. Par conséquent, c’est auprès d’elle qu’elle sera encline à trouver « les premiers secours ». Cela, une personnalité perverse le redoute, raison pour laquelle elle s’attachera à détruire cet attachement. La séduction est une arme de choix car elle met la victime en porte-à-faux avec les siens. Aux coups qu’elle reçoit de son partenaire s’ajoute alors le choc de voir sa souffrance incomprise. Elle ne sait pas encore que l’on joue avec les siens, comme avec des pions que l’on pousse sur un échiquier.

Car le pervers narcissique n’entretient ni sentiments, ni remords, ni empathie, mais juste une froide stratégie : sa victime à lui, et à lui seul.

Pour enclaver complétement une victime, une personnalité perverse doit aussi s’attaquer aux amis, collègues ou relations. Tout comme la famille, ils seront souvent séduits. Tous ? Non, pas tout à fait, car certains signes chez lui mettent mal à l’aise les personnes les plus perspicaces. Qu’à cela ne tienne, un manipulateur narcissique les écarte sans ménagement. Il est à noter qu’il écartera aussi impitoyablement de sa vie de couple toute personne ne répondant pas aux hauts critères de standing social qui sont les siens. Craindrait-il que des personnes humbles puissent flairer plus facilement que d’autres la vanité de son personnage ? Cette question n’est pas sans intérêt…
Les armes dont il se sert pour écarter les indésirables sont celles de ses manipulations ordinaires : dénigrement, chantage affectif, mensonges, fausses insinuations… Il exerce volontiers un harcèlement du type « c’est lui/ elle ou moi »  pour obtenir ce qu’il veut. Il n’hésitera pas à intriguer ou mentir pour brouiller des amis, tout en finissant par conclure, satisfait : «  Je te l’avais bien dit… »

Quelle réaction possible ?

Les victimes qui subissent une emprise perverse sont amenées dans la plupart des cas à baisser leur garde. La mise en dépendance dont elles sont l’objet et la personnalité, apparemment brillante du pervers sur le plan social, leur barrent toute issue de secours.
Pourtant, elles doivent parvenir à briser la glace pour enrayer le processus d’isolement que la personnalité perverse met en place autour d’elles. Reprendre contact avec l’entourage est un pas essentiel vers la sortie de l’enfer. Les victimes qui poussent la porte d’un thérapeute le comprennent rapidement et entreprennent assez vite ce geste essentiel. Recontacter des proches subjugués est certes, délicat, mais s’effectue progressivement. Un entourage incrédule découvre en effet petit à petit les dégâts causés par le personnage trop lisse et trop parfait du pervers.
Quant aux amis qui ont été écartés, nombreux sont ceux encore capables d’aider. Encore faut-il qu’ils comprennent que la victime essaie vraiment de se dégager de cette relation toxique.

Quand les victimes ont quitté leur emploi, elles ajoutent l’isolement physique à l’isolement relationnel. Ce vide est éminemment dangereux, car coupées de leurs repères, elles subissent un processus de dépersonnalisation. C’est là qu’elles tirent souvent la sonnette d’alarme, notamment en entamant une thérapie. Car quand il devient de plus en plus dur pour elles de penser et de réagir, une souffrance trop forte fera alors office de signal.