Le chantage affectif du PN est l’une des nombreuses cordes à son arc pervers. Une phrase qui commence par “si” et finit par une menace de représailles ou une promesse de gratification a de bonnes chances d’être surtout un leurre.
Par cette forme conditionnelle dans laquelle un comportement hypothétique engendrerait des conséquences, on influence la personne visée par cette prédiction.
Parmi toutes les techniques manipulatoires d’un prédateur sentimental, le contrôle coercitif par intimidation instaure une dynamique de pression émotionnelle terriblement lourde à supporter pour la victime.
Voyons comment le chantage affectif opère afin d’apprendre à en déjouer les pièges.
Qu’est-ce que le chantage affectif ?
Le chantage affectif du PN revêt une forme parfois plus insidieuse de manipulation émotionnelle que pour la majorité des gens relativement sains d’esprit qui y ont malgré tout recours.
La différence réside dans le degré de conscience. Chez la personnalité narcissique perverse, la dimension parfaitement voulue et maîtrisée de l’objectif de domination est indéniable.
Chez les personnes dont le but est autre que celui de détruire leur interlocuteur, l’usage du chantage affectif sera moins lucide. Dans les grandes lignes, le but de ce procédé manipulatoire est de contrôler les agissements de l’autre en jouant sur ses sentiments.
A retenir
Le chantage affectif est une arme redoutable du pervers narcissique, utilisant menaces ou promesses pour manipuler et contrôler sa victime. Cette dynamique de pression émotionnelle exploite les peurs et désirs de la cible, rendant la relation profondément toxique.
Quelques exemples de pression émotionnelle
Le chantage affectif se résume à des paroles et s’appuie sur l’imaginaire de la victime.
Le plus souvent, il est formulé selon une structure de phrase aussi simple qu’efficace :
- Une condition matérialisée par un “si” ou une prédiction avec l’usage du temps futur et de l’adverbe “quand”.
- Une description du comportement à abolir ou à adopter chez la personne visée.
- Une annonce de conséquence, représentée soit par une menace de représailles, soit par une promesse de gratification.
Voyons quelques mises en application de cette structure créant un faux rapport de cause à effet :
- “Si tu m’aimais vraiment, tu ferais ce que je te demande”
- “Si tu me fais un enfant, je t’épouse”
- “Si tu n’as pas autant de libido que moi, je serai contraint d’aller voir ailleurs”
- “Si tu continues de parler à cette personne, notre relation ne pourra pas durer”
- “Si je n’étais pas là à tes côtés, personne ne voudrait de toi”
- “Si tu me quittes, je me tue”
- “Tu feras moins la maline quand j’arrêterai de t’aider”
- “Tu verras comme ta vie sera misérable quand je ne serai plus là”
- “Si tu reviens, je te montrerai comme j’ai changé”.
On se rend bien compte ici que cette façon de raisonner et de mettre en lien deux événements pourtant indépendants l’un de l’autre est déclinable à l’infini.
C’est bien l’un des rares cas dans la vie dans lequel il vaut mieux s’attacher à la forme, plutôt qu’au fond. Si vous avez un doute sur la nature de la promesse que l’on vous fait, que celle-ci soit à consonance positive ou négative, veillez donc en premier lieu à vous demander dans quelle mesure celle-ci est conditionnée par vos actions.
De plus, c’est un procédé que l’on retrouve dans de nombreuses dynamiques relationnelles comme dans le travail, en amitié ou même avec des enfants.
N’avez-vous jamais entendu quelqu’un dire à un petit “si tu n’es pas sage, le père Noël ne viendra pas” ou “une bouchée de plus pour faire plaisir à maman” ?
Ces situations sont tellement banales qu’on en oublie leur manque d’efficacité, voire leur caractère délétère. Mais ne dérivons pas trop sur la violence éducative ordinaire qui fait l’objet d’un article complet ici.
Notre propos est, tout d’abord, de démontrer que le chantage affectif est beaucoup trop répandu chez tout le monde, ensuite, qu’il n’est pas à encourager, particulièrement chez les personnalités équilibrées et, enfin et surtout, qu’il est dangereux pour les victimes de MPN.
A retenir
Les phrases typiques du chantage affectif suivent un schéma conditionnel : un “si” ou un “quand”, suivi d’une menace ou d’une promesse. Ces manipulations jouent sur les émotions pour imposer des comportements au détriment du libre-arbitre de la victime.
Comment le PN utilise-t-il le chantage affectif pour parvenir à ses fins ?
Dans la pression émotionnelle, il y a un message d’avertissement émis par une personne qui affirme que ses actes découlent de ceux de son interlocuteur. Admettre ce postulat, c’est donc induire l’idée que la responsabilité repose essentiellement sur le récepteur dudit message.
En d’autres termes, l’individu qui énonce ce type de phrases vous soumet à son bon vouloir en s’appuyant sur vos aspirations ou vos peurs.
Il vous fait miroiter la carotte ou le bâton en vous faisant croire que tout est fonction de vos décisions. N’est-ce pas là le summum de la manipulation que de vous faire intégrer que ce qu’il vous inflige vous est entièrement imputable ?
La soumission librement consentie est un concept dont raffolent les PN. À travers des jeux sadiques de culpabilisation, de chaud et de froid, de micromanipulation, d’impositions subtiles, etc., l’emprise du pervers narcissique engendre un profond déséquilibre psychique chez la personne qu’il a prise pour cible, ce qui rend la relation toxique.
Nous avons vu que ce type de violence psychologique s’appuie sur la responsabilisation systématique de la proie, tout en maintenant une façade d’innocence du bourreau. Dans ce renversement des rôles, la manipulation repose sur l’exploitation des émotions comme la peur ou l’envie.
Ce conditionnement comportemental favorise une régulation extrinsèque du degré de motivation de la victime.
Autrement dit, plutôt que d’agir pour elle-même et par elle-même, elle le fait pour des motifs qui lui sont externes.
Elle en oublie donc de se connecter avec son propre désir. C’est un réflexe que l’on retrouve chez les personnes portant le syndrome de l’infirmière ou du sauveur.
A retenir
Le pervers narcissique exploite la culpabilité et les aspirations de sa victime pour la soumettre à ses demandes. Ce conditionnement comportemental détourne la motivation intrinsèque de la victime, l’empêchant de se connecter à ses propres désirs.
Comment désamorcer les tentatives de chantage affectif par un PN ?
Puisque la promesse de conséquences à nos comportements n’est, au moment de l’énoncé, qu’une hypothèse, il suffit de la déconstruire. Pour cela, il est utile de respecter 3 étapes.
Étape 1 : S’observer
Désamorcer le chantage affectif d’un pervers narcissique nécessite avant tout d’adopter une position d’observation de sa vie émotionnelle.
Cette posture déportée permet d’envisager la situation avec un regard un peu plus distancé et donc, par définition, plus réflexif. Pour réussir cet exercice, il faut s’interroger :
- “Qu’est-ce que la phrase active chez moi ?” : il peut s’agir d’un sentiment de peur, d’inquiétude, de culpabilité ou d’excitation, ou bien d’une gêne difficilement définissable, mais qui témoigne d’un malaise.
- “Quelles réactions physiologiques suis-je en mesure de repérer ?” : rythme cardiaque et souffle accéléré, mains moites, frissons, sifflements d’oreille, sensation de tension interne peuvent marquer le repère que votre corps manifeste peut-être ce que votre intellect n’a pu identifier.
- “Que me rappelle cette situation ?” : la projection induite par le chantage affectif s’accompagne habituellement d’un modèle tiré du passé. Ce souvenir peut être heureux ou malheureux, mais il constitue surtout une faille par laquelle le manipulateur a pu s’engouffrer. C’est probablement un point à travailler en psychothérapie afin de renforcer vos défenses psychiques contre les intrusions malveillantes.
Le PN joue souvent sur la culpabilité et la séduction pour créer une dépendance émotionnelle. Il est donc crucial de développer la compétence à se distancer de ses affects pour pouvoir les observer sans les laisser gouverner.
Étape 2 : Analyser l’annonce
Votre leitmotiv face au chantage émotionnel devrait être “il est urgent de ne rien faire”. Si vous sentez la pulsion d’agir monter, maîtrisez-la grâce à votre regard distancé.
Vous devez mobiliser toutes vos capacités de jugement pour analyser froidement la proposition de votre interlocuteur. Posez des limites claires et exprimez votre besoin de bénéficier d’un temps de réflexion.
C’est dans ces conditions que vous pourrez décortiquer la structure de la phrase telle que nous vous l’avons délivrée plus haut et surtout, le caractère plausible de ce qu’elle contient.
Après tout, si c’est votre comportement qui peut créer un terrible effet boule de neige, vous avez bien le droit de prendre un moment (sans sa présence, de préférence) pour peser votre décision, non ?
Et pourquoi ne pas consulter votre entourage ?
Étape 3 : Prendre votre décision
Vous l’avez compris, l’objectif du chantage affectif est de vous faire agir sur un coup de tête pour que vous soyez la seule personne vers qui se retourner en cas d’impair.
Si vous appliquez les 2 premières étapes, vous vous affranchissez du côté “tête brûlée”. Il vous reste donc à peser le pour et le contre de la proposition pour identifier l’intérêt qu’elle représente pour vous et décider si vous souhaitez y répondre ou pas.
Selon vos valeurs et en rapport avec nos exemples, pensez-vous, en toute objectivité, que :
- L’amour se mesure selon le degré de soumission aux demandes de l’autre ?
- Le mariage est une récompense pour avoir conçu un enfant ?
- Faire l’amour sans envie permet d’éviter l’adultère ?
- Rester avec quelqu’un dont on ne veut plus permet d’empêcher son suicide ?
- Aucune autre personne sur terre ne voudrait de vous ?
Nous n’allons pas refaire tous les exemples, mais vous voyez bien qu’une fois dépouillées de leur charge affective, ce qui ressort de ces propositions, c’est leur absurdité.
Par conséquent, quel est pour vous l’intérêt de vous plier aux exigences de votre bourreau ? Une fois de plus, c’est bien la preuve que les pervers narcissiques maîtrisent surtout l’art de la poudre aux yeux.
Le chantage affectif du PN est un outil de manipulation incontournable visant à contrôler la victime en exploitant ses émotions les plus primaire s.
Par des menaces ou des promesses, le pervers narcissique parvient à instaurer un climat de tension affective qui fait obstacle au libre-arbitre.
En reconnaissant la structure et le bien-fondé de cette pression émotionnelle, et en analysant objectivement chaque condition aux comportements envisagés, il est possible de désamorcer ces tentatives de domination tout en mettant en lumière leur absurdité.
A retenir
Pour contrer le chantage affectif, trois étapes clés :
- S’observer : Identifier ses émotions et réactions physiques face à la manipulation.
- Analyser l’annonce : Prendre du recul, poser des limites et évaluer la plausibilité de la demande.
- Prendre une décision : Décortiquer la proposition pour en révéler l’absurdité et agir selon ses propres valeurs.