Comprendre ses craquages nerveux
Le manipulateur sentimental est connu pour son aspect froid, calculateur et dénué des émotions habituelles d’une personne relativement normale. Alors quid des accès de rage du PN ? Ses victimes ont toutes été confrontées à ses explosions de colère, preuve qu’il est doté d’une certaine sensibilité qui le rapproche davantage de l’humain que du robot. Mais comme tout est stratégie avec ce genre de personnage, qu’est-ce qui nous dit que ses émois ne sont pas mis en scène ? Cherchons à comprendre ses craquages nerveux pour limiter leur impact sur ceux qui les subissent.
Qu’est-ce qu’une crise de colère ?
L’émotion de la colère peut naître de plusieurs facteurs. Pour le commun des mortels, ils sont le plus souvent externes, c’est-à-dire liés à l’environnement. Pour le PN et dans certaines circonstances, ils peuvent être aussi internes, autrement dit de l’ordre de la construction imaginaire, comme dans le cas de sa jalousie maladive, mais nous y reviendrons. Ce qui met en rage révèle une frustration, un manque, une menace, une injustice, une déception. En bref, c’est la manifestation d’une forte insatisfaction. Cela peut aussi être symptomatique d’autres pathologies telles que :
- la bipolarité (s’il y a une perte de réalité) ;
- le trouble oppositionnel (avec négation, défiance, hostilité, aversion pour les normes, difficulté à maintenir un effort mental) ;
- le trouble explosif (avec une irritabilité omniprésente, des actes violents, voire graves) ;
- le TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) ;
- la toxicomanie (lorsque l’impulsivité est liée uniquement aux substances).
Nous ne traiterons ici que des accès de rage excluant les conditions pathologiques énumérées ci-dessus.
Les manifestations physiologiques du coup de sang
En neurobiologie, le circuit de l’agressivité se traduit par un déficit du contrôle inhibiteur de la zone frontale du cortex. Les capacités de raisonnement ne parviennent pas à réguler l’excitation émotionnelle. L’accès de rage est toujours accompagné de signes physiques telles que l’augmentation de la fréquence cardiaque et respiratoire, de la sudation et de la tension musculaire. Elle donne d’ailleurs sa coloration rouge au visage colérique qui permet de susciter la peur chez l’autre et attribue par la même occasion l’appellation de “sanguin” à ce type de profil.
L’utilité de se mettre en colère
En réalité, la furie est utile pour mobiliser toutes les ressources attentionnelles sur la nécessité d’une action. Celle-ci sera soit immédiate, soit elle passera au préalable par une prise de décision. Dans un contexte défensif, la colère permet de rassembler toutes ses forces pour lutter contre une agression physique ou la fuir. C’est donc une fonction d’ordre vital essentielle à la préservation de l’espèce.
Par ailleurs, elle a aussi un rôle protecteur à niveau psychique. En effet, elle est une étape bien connue du processus de deuil par exemple. Elle sert à prévenir entre autres le risque de sombrer dans la dépression qui peut découler de la tristesse de la perte.
Les comportements typiques du sujet colérique
Il existe une colère éruptive, tonitruante, qui ne laisse pas de place au doute quant à l’état émotionnel du sujet ; et une colère froide, contenue, mais plus longue et qui peut précéder une explosion plus tardive. En dehors de la crise de rage, une personnalité impulsive présente le souvent des comportements marquant une tendance à jouer avec les limites comme :
- provoquer ;
- présenter une conduite à risque ;
- couper la parole ;
- changer de sujet ;
- ne pas accepter les avis et critiques ;
- exprimer ouvertement ses opinions, même si elles sont blessantes ;
- s’adonner à l’addiction (surtout l’alcool) ;
- avoir des exigences personnelles et envers autres élevées ;
- redouter de perdre la reconnaissance des autres ;
Toutes ces attitudes traduisent une impétuosité latente et surtout, une grande préoccupation pour le maintien d’un certain contrôle. C’est précisément la sensation que les choses lui échappent qui fait sauter les plombs au sujet colérique.
Les hommes ont-ils plus de mal à contenir leur furie ?
La croyance qui attribue le caractère coléreux majoritairement aux hommes est en partie vraie. Les études scientifiques ont révélé que les personnes agressives présentent un taux de testostérone élevé, sachant que cette hormone est naturellement plus présente chez les sujets masculins. De plus, il a été observé en condition expérimentale que des injections de testostérone faisaient baisser le taux de sérotonine, hormone régulatrice du comportement.
À noter que l’alcool gêne également le bon fonctionnement de la sérotonine en se fixant sur les récepteurs neuronaux en principe destinés à cette dernière. Ceci explique d’ailleurs la forte corrélation entre la consommation de boissons alcoolisées et le passage à l’acte suicidaire, facilité par une perturbation des fonctions inhibitrices face au danger.
Quand l’accès de rage devient-il problématique ?
La colère permet d’exprimer son positionnement face à un événement, ce qui peut être une bonne chose en soi. Mais bien entendu, avec l’accès de rage viennent divers problèmes :
- La systématisation de l’impulsivité. S’habituer à “dégoupiller” peut créer un cercle vicieux dans lequel la difficulté de se contrôler intervient pour des phénomènes de moins en moins importants, et donc, de manière plus fréquente.
- Le risque cardio-vasculaire. Les sujets dits “soupe au lait” présentent une propension à développer un diabète de type 1, lié à des problèmes cardiaques et vasculaires.
- Les répercussions sur l’entourage. Les accès de colère provoquent des dégâts dans la sphère privée, mais aussi professionnelle et amicale. Le foyer dans lequel l’explosion de rage est récurrente pâtit d’un climat d’insécurité et de stress particulièrement délétère chez les enfants. Les relations sociales sont quant à elles fortement entachées.
- L’atteinte à l’estime de soi. Quelqu’un qui perd le contrôle de ses affects démontre une vulnérabilité et une imprévisibilité dérangeante. Cela peut conduire à de la honte, des regrets et souvent, un repli social.
- L’escalade vers la violence. Par son aspect irrépressible, la furie échappe à la volonté. Sans finalité ni planification mentale ni même mesure des conséquences, il est bien difficile de prédire à quel moment elle va s’arrêter.
À ce sujet, nous vous renvoyons vers le fait divers qui a désacralisé Oscar Pistorius, grand athlète paralympique, qui aurait pu se contenter de marquer l’histoire du sport si son “crime passionnel” suite à un coup de sang dû à la jalousie n’avait pas marqué l’histoire tout court.
Le pervers narcissique peut-il réellement ressentir l’émotion de colère ?
S’il est incapable d’éprouver de l’empathie, ni même de l’amour, comment se fait-il que les victimes manipulées aient presque toutes fait l’expérience des accès de rage du PN ? Difficile d’affirmer que ce vampire émotionnel n’a effectivement pas de cœur et qu’il ne ressent rien, alors que sa furie le pousse parfois jusqu’à la violence physique. Certes… mais souvenez-vous de la phase de la lune de miel. Vous y avez cru à son adoration débordante. Et même si votre MPN est votre patron et qu’il ne s’agit que d’un lien de travail, vous avez aussi eu droit aux débuts de relation exaltants dans lesquels vous vous sentiez sur la même longueur d’ondes. Vous savez donc à quel point ses talents d’acteur peuvent être convaincants. Alors à la question “Peut-on être impulsif et stratégique à la fois ?”, pour un manipulateur sentimental, la réponse est malheureusement oui.
En effet, sa faille narcissique a scellé à jamais son immaturité émotionnelle. Ainsi, le lit de sa colère, celle qu’il ne peut parfois plus contenir malgré tous ses efforts pour composer un personnage social adapté, c’est la frustration. Rappelons que son besoin irrépressible de manipuler lui vient du vide intérieur auquel il est incapable de faire face. C’est donc une personnalité angoissée qui calme son chaos existentiel par la recherche de contrôle absolu d’autrui. La moindre mise en péril de son apparente hégémonie le met dans un émoi intolérable. De plus, faire la démonstration de son courroux contribue à entretenir la peur de ceux qu’il maintient sous son emprise. De fait, il peut se permettre d’ouvrir les vannes de sa rage pour deux raisons : ça le décharge nerveusement en même temps que ça restaure son autorité, surtout si celle-ci a été menacée par une tentative de rupture de la relation toxique de la part de sa proie.
Que faire face à quelqu’un en proie à un accès de rage ? Comment ne pas y céder à son tour ?
Face à un emportement de rage, le plus grand danger, ce sont nos neurones miroirs. Ils sont responsables de l’automatisme naturel qui nous surprend à imiter la personne en face de nous, qu’elle bâille, qu’elle ouvre la bouche, qu’elle fronce les sourcils, etc. Ce qu’il faut retenir, c’est que la colère entraîne la colère. Lorsque l’on est conscient de ce phénomène, l’attitude la plus sage à adopter, c’est de ne pas s’engouffrer dans le jeu de la surenchère. C’est évidemment plus difficile à dire qu’à faire, mais l’évitement est la meilleure des stratégies.
Pour parvenir à rester en contrôle de vos propres émotions, nous vous recommandons 3 astuces très simples :
- Verbaliser votre colère. Si vous êtes capable de dire “je suis en colère”, c’est que vous ne l’êtes plus. Face à un pervers narcissique, il n’est probablement pas de bon ton de lui donner cette information, mais si vous parvenez à le formuler mentalement uniquement pour vous, c’est que vous êtes dans une certaine maîtrise à laquelle vous devez vous accrocher pour traverser la tempête.
- Vous allonger. La position horizontale annule les effets physiologiques de la furie. C’est aussi simple que cela.
- Visualiser le cerveau dans la main. Daniel Siegel a élaboré cette métaphore pour faciliter la compréhension de l’ambivalence entre raison et émotions. Il suffit d’imaginer que le pouce replié sur la paume est la partie émotionnelle de notre encéphale, et que les 4 autres doigts viennent le recouvrir pour former le raisonnement. Effectuer ce geste de fermeture du poing sur le pouce peut vous aider à réguler vos émois en visualisant simplement votre cortex préfrontal (représentés par vos 4 plus grands doigts) qui empêche les intrusions vers votre système limbique (figuré par votre pouce).
Il convient aussi de se rappeler que la colère est l’expression d’une appréciation négative d’une situation. Elle a une composante subjective, mais c’est un facteur extérieur qui la provoque. Il faut donc réussir à se détacher de l’aspect immuable (l’événement déclencheur) pour se concentrer sur ce qui peut être modulé par notre volonté et nos actions (notre réaction au stimulus). En d’autres termes, l’attention doit se focaliser sur ce qui peut être changé, et ce qui ne le peut plus doit être accepté comme tel. C’est en se transformant en un autre type d’énergie que la colère se gère.
Comme le disait Ségolène Royal, “il y a des colères qui sont saines” parce qu’elles permettent d’exprimer un désaccord et, à terme, de parvenir à mieux se comprendre soi-même et les autres. Ce qu’il faut à tout prix éviter, c’est de la retourner contre soi ou contre ceux qui ne la méritent pas. Lors d’un accès de rage du PN, il est crucial de fuir la confrontation et de se protéger de son aspect contagieux et destructeur. Souvenez-vous qu’un manipulateur sentimental a tendance à projeter sa haine sur sa proie et qu’il s’agit rarement d’une réelle remise en cause de votre être ou de vos agissements. De plus, la hargne peut s’expliquer par des facteurs culturels, environnementaux ou issus du passé tels que des conflits anciens non traités. Il n’y a de mauvaises colères que celles qui sont débordantes de façon récurrente, auquel cas la consultation psychologique peut s’avérer être un excellent atout de gestion émotionnelle.