QU’EST-CE QU’UN PARENT TOXIQUE ?

Tous les parents toxiques ne sont pas forcément à ranger dans la catégorie de la manipulation perverse. De même, une figure parentale nocive peut l’être seulement temporairement à certains moments de sa vie (dépression, stress, deuil, conflit, etc.) ou encore s’avérer néfaste alors que son objectif premier semble louable comme chercher à rendre sa fille et son fils “parfaits”. Ainsi, il est légitime de se demander si une figure parentale bien intentionnée peut faire du mal à son enfant malgré elle. Qu’est-ce qu’un parent toxique ? Qu’est-ce qui définit la malignité d’un ascendant, qu’elle soit consciente ou inconsciente ? Explorons ces questionnements.

La toxicité parentale sur fond de bienveillance

Il n’est pas obligatoire que le parent toxique soit un manipulateur pervers avéré pour causer des dégâts psychologiques chez son enfant. Parfois, un environnement familial pesant ou des paroles inadéquates par rapport à l’âge de sa progéniture peuvent ancrer en elle des dommages qui terniront le développement de sa personnalité.

Quand le cadre d’éducation étouffe l’individualité

Une figure parentale néfaste peut tout aussi bien prendre la forme d’un père trop autoritaire, d’une mère castratrice, d’un grand-père inexpressif, d’une grand-mère anxieuse, d’un beau-père violent, d’une belle-mère jalouse, etc. Tous les cas de figure sont envisageables et c’est bien là le problème. L’être immature grandit dans ces atmosphères chargées de tension et les intègre en tant que normalité. Ainsi, il adoptera des comportements adaptés au contexte dans lequel il est élevé par mimétisme, sans savoir que ces schémas induits ne lui appartiennent pas et seront pourtant appelés à être répétés parfois toute sa vie de façon inconsciente s’il n’effectue pas un travail thérapeutique à un moment de son existence pour s’en défaire.

En réalité, et pour éviter d’énumérer une multitude de petits actes ordinaires toxiques, il suffit de prendre en compte ce grand principe : projeter sur un petit être en devenir ses propres travers et névroses représente un danger sur la psyché de l’enfant. Cette seule pensée effrayante abonde dans le sens de la culpabilité et de l’angoisse perpétuelle qui accompagnent immanquablement la maternité et la paternité. Pourtant, il faut savoir trouver la jauge entre se déculpabiliser et se responsabiliser. C’est pour cela que le suivi thérapeutique de tout parent ayant eu un père ou une mère toxique reste le meilleur garant d’un développement sain pour sa progéniture.

Quand l’enfant est lesté du poids de la responsabilité

Les petits ont cette fâcheuse tendance à se croire fautifs des tourments de leurs parents. L’un des pièges fréquents qui appuie ce trait parental toxique pour l’enfant, c’est de l’inclure dans certaines décisions, tandis qu’il n’a pas encore la maturité suffisante pour en porter le poids. Sous couvert de communiquer et de laisser une place aux envies de l’enfant, on le positionne finalement face à un dilemme très inconfortable.

Le sujet immature est chargé du fardeau de la responsabilité de l’avenir de la famille, alors qu’il a besoin de réassurance. Et justement, celle-ci repose grandement sur la conviction que les décisions sont prises pour lui et dans son intérêt. Demander à un enfant s’il préfère habiter avec papa ou avec maman, c’est le mettre en souffrance face à un choix impossible puisqu’il revient à rejeter l’un de ses parents, autrement dit : l’un de ceux en qui il a placé sa confiance et son amour. Ceci le met sous pression et crée un conflit de loyauté particulièrement néfaste, surtout si cette situation résulte de la manipulation perverse d’un parent toxique.

La manipulation perverse narcissique sur l’enfant

Pour le cas du parent pervers narcissique, le problème de la nocivité est d’autant plus inquiétant qu’il réside dans son incapacité à faire preuve d’empathie. C’est cette inaptitude totale à ressentir les émotions des autres qui l’autorise à faire basculer sa propension à la manipulation vers son travers sadique. Et les enfants, tout innocents soient-ils, ne sont malheureusement pas épargnés par ce comportement pathologique.

L’enfant-objet du parent toxique manipulateur


Dès leur plus jeune âge, les enfants de PN sont instrumentalisés. Ils deviennent un symbole de réussite ou un modèle d’obéissance, par exemple. Qu’ils servent d’exutoire ou de faire-valoir, ils sont dépouillés de leur droit à “être” alors qu’ils sont en pleine construction de leur personnalité. Ceci provoque inexorablement une blessure psychique qui, si elle prend trop d’ampleur, pourra à son tour engendrer un trouble narcissique. L’influence d’un parent pervers peut orienter le développement de l’enfant dans le sens de la toute puissance perverse. Ainsi, il n’est pas rare que les enfants de PN deviennent aussi des manipulateurs pervers.

En réalité, l’attachement (puisqu’on ne peut évidemment pas parler d’amour) du PN envers sa descendance est plutôt de l’ordre du sévice moral. Tout est fait pour tenir l’enfant sous son joug et sacrifier son besoin d’autonomie. Le mineur subissant cette emprise est en général extrêmement solitaire et sensible, en quête perpétuelle d’une figure parentale plus enveloppante, moins creuse. Ceci ouvre la porte à une future dépendance affective ou à différents troubles (alimentaires, relationnels, comportementaux, etc.).

La progéniture du PN comme arme de destruction ultime


Tant qu’une mère (ou un père) est entre les griffes d’un pervers narcissique, c’est souvent elle qui endossera le rôle de cible des techniques manipulatoires du prédateur sentimental. Mais lorsqu’elle s’extirpe de l’emprise morale, on observe fréquemment que l’attention du PN se tourne vers les enfants du couple. Ceux-ci représentent non pas des personnes, mais des moyens d’affecter la mère fugitive. On parle alors d’aliénation parentale qui place la progéniture au centre du conflit du couple et la rend même active, avec toutes les conséquences qui pourront en découler plus tard.
Les combats pour la garde en cas de séparation avec un manipulateur n’ont d’ailleurs rien à voir avec l’envie, pour lui, de voir ses enfants. Ils n’ont pour objet que de prolonger perpétuellement la souffrance de la victime de pervers narcissique, déjà fragilisée. Lui retirer ses enfants, c’est continuer de la torturer, tout en ayant sous la main des proies encore plus faciles pour retrouver une certaine satisfaction destructrice. C’est pourquoi la séparation avec un PN avec qui l’on a eu des enfants devrait toujours se faire avec le soutien d’un thérapeute.

De même, à la façon d’un marionnettiste, le parent toxique PN se délecte d’orchestrer des conflits dans les fratries. Il n’hésite pas à faire régner le chaos dans lequel les jalousies entre frères et sœurs et les jeux de domination entre aînés et cadets sont monnaie courante. Les enfants ayant grandi dans ces conditions ne sont pas inexorablement condamnés à devenir manipulateurs pervers, mais il est certain que la question de leur propre parentalité leur tiendra particulièrement à cœur lorsque le temps viendra.

Si l’on a grandi auprès d’une vraie figure parentale perverse narcissique, on sait facilement répondre à la question : qu’est-ce qu’un parent toxique ? C’est finalement une force que de savoir, par le manque, ce qui est important. Mais là où les lignes sont plus floues, c’est lorsqu’il faut admettre qu’un ascendant d’apparence bienveillante a pu être, en réalité, nocif sur certains points. Avec du recul sur soi-même et du bon sens, il est possible d’échapper aux pièges les plus sournois de la toxicité parentale lorsque l’on veut réellement le meilleur pour son enfant.